“Nous avons devant nous un été difficile”, a averti le Premier ministre grec, Kyriakos Mitsotakis. Alors que le pays est en proie à de violents incendies depuis le début de l’été, ayant entraîné dimanche l’évacuation de 32 500 personnes à Rhodes et Corfou, de nombreuses régions du pays demeurent, mardi 25 juillet, “en alerte rouge”, c’est-à-dire en “danger extrême” de feux de forêt, avec des températures atteignant 44°C. Mardi, un avion bombardier d’eau s’est écrasé sur l’île d’Eubée en luttant contre les flammes.
Ces derniers jours, des voix s’élèvent pour dénoncer un manque de moyens et de préparation face aux incendies. Vacanciers contraints d’abandonner leurs valises dans les flammes, marchant des heures sous la chaleur, habitants entassés dans des gymnases… Les témoignages dans la presse rendent compte du chaos qui a accompagné les évacuations. Si depuis 2007, la Grèce est tristement habituée aux incendies, toutes les leçons ne semblent pas avoir été retenues.
Des moyens matériels et humains parfois défaillants
“L’effondrement du climat avec des pics de température explique beaucoup de choses, mais n’excuse pas les lacunes”, dénonce le quotidien grec I Naftemporiki, qui souligne que “deuil et cauchemar prennent la tournure de la normalité”. Sur le terrain, face aux flammes, le journal économique ironise sur le matériel défectueux des forces de secours. Avec un exemple simple, mais concret : les lances des camions-citernes qui ne sont pas adaptées aux robinets. “Les pompiers ne mettent de l’eau qu’à partir d’un seul robinet. Il y a cinq extincteurs et ils attendent d’être remplis à partir d’une bouche d’incendie, car ils ne peuvent pas être connectés aux autres”, rapporte I Naftemporiki.
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De son côté, le journal local I Avgi affirme que “85% des 3 500 camions de pompiers ont plus de 10 ans”. Il pose également la question des moyens humains : 4 500 postes sont vacants au sein du service d’incendie et l’âge moyen du personnel dépasse 45 ans, selon le quotidien de gauche. Chez les Grecs, l’autre point de crispation concerne la prévention. “Chaque année, nous payons environ 240 millions pour la protection des forêts. Parmi ceux-ci, environ 80% vont à l’extinction et seulement 20% à la prévention”, informe I Avgi.
Des carences dans l’entretien des forêts
Le coordinateur du programme terrestre du Fonds mondial pour la nature (WWF) en Grèce, Nikos Georgiadis, est catégorique. “Le vrai problème actuellement est l’absence de plan national de prévention des incendies et de gestion des déchets végétaux”, déclare-t-il au Monde.
Les forêts grecques souffrent d’un manque criant d’entretien, ce qui les rend plus vulnérables aux incendies. “Il y a encore trente ans, des éleveurs, des agriculteurs, des résiniers travaillaient dans les bois et géraient cette végétation, mais maintenant ce n’est plus le cas, les forêts se sont développées de manière incontrôlée depuis vingt ans en Grèce”, explique Nikos Georgiadis.
D’un point de vue législatif, il n’existe pour les particuliers aucune obligation de débroussailler ou d’élaguer les arbres, alors que c’est le cas pour les municipalités. Mais selon le maire de Mati, cité par La Croix, ces dernières ne le font pas toujours, “par manque de moyens”. Cette station balnéaire de la région d’Athènes a par ailleurs été le théâtre, en 2018, de l’un des incendies les plus meurtriers d’Europe.
Un manque de coopération et de communication
Un autre écueil est pointé du doigt par les Grecs : la mauvaise collaboration entre les acteurs responsables de cette gestion des incendies. “Il faut une meilleure coopération entre tous les acteurs – scientifiques, gouvernement, autorités locales, services forestiers”, juge auprès du Monde Theodoros Giannaros, chercheur spécialisé sur les incendies à l’Observatoire national d’Athènes.
A Loutraki, commune proche de la capitale touchée par un incendie lundi 17 juillet, la mairie n’a par exemple pas eu le droit d’ouvrir des zones pare-feux dans la forêt. “On doit attendre que le gouvernement donne son accord pour couper ne serait-ce qu’un seul arbre”, illustre auprès du journal Libération Ioannis Sklias, chef local du parti de gauche Syriza.
Les habitants déplorent, eux, un manque d’informations quant à leur sort. Selon Morgane Duclaux, une Française installée sur l’île de Rhodes interrogée dimanche par franceinfo, “beaucoup d’efforts ont été faits par la population locale, mais, du côté des autorités, la communication a été très minimale”, avec uniquement des “messages d’évacuation”.
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