Dix-huit Palestiniens sont morts en tentant de récupérer de la nourriture parachutée, lundi 25 mars, selon les autorités de la bande de Gaza, dirigées par le Hamas. Douze d’entre eux ont péri noyés au large d’une plage de la ville de Gaza, après la chute de provisions en mer, tandis que six autres ont été tués dans des bousculades. “Quand les parachutes sont tombés dans la mer, (…) des jeunes hommes et des garçons ont pataugé dans l’eau pour récupérer des boîtes”, a raconté un témoin à l’AFP. “Malheureusement, certains d’entre eux ne sont jamais revenus”.
A la suite de ce drame, l’organisation islamiste a appelé mardi à cesser le parachutage de colis. Elle dit avoir “toujours prévenu les pays conduisant des opérations de largage aérien du danger”, notamment “car une partie de cette aide tombe dans la mer”. Début mars déjà, plusieurs colis aux parachutes défaillants avaient percuté des habitants de la ville de Gaza, faisant cinq morts et 10 blessés. Ces opérations sont menées par plusieurs pays arabes et occidentaux afin de contourner le blocus du territoire par Israël, qui complique l’entrée des camions dans l’enclave. Mais plusieurs ONG dénoncent une méthode à la fois inadaptée et insuffisante alors que l’ONU redoute une famine généralisée. Franceinfo vous résume ce débat.
Il peut être dangereux pour la population
Le largage aérien a été utilisé pour la première fois par les Nations unies en 1973 dans le Sahel occidental, où la population souffrait de famine, rappelle le Programme alimentaire mondial (PAM). Par la suite, plusieurs pays ont livré de l’aide par ce moyen, lors de la guerre en Irak (2003-2011) ou encore au Soudan du Sud (2013-2020).
La préparation d’un largage est précise et complexe. Chaque colis doit être emballé solidement pour que son contenu résiste à l’atterrissage. Le largage peut être effectué à des altitudes allant de 300 à 5 600 mètres, explique le PAM – dans les zones de conflit par exemple, l’avion doit voler suffisamment haut pour ne pas risquer d’être touché par l’artillerie au sol. La météo est également scrutée, car des vents violents ou des tempêtes de sable peuvent affecter la précision du parachutage. “Une préoccupation première est la sécurité des destinataires”, a expliqué à l’AFP Jeremy Anderson, lieutenant-colonel de l’armée de l’air américaine. “On s’assure que si le parachute ne s’ouvre pas, il finisse en mer et de ce fait ne blesse personne.”
Mais malgré ces précautions, les largages de colis ne sont “pas sans risques”, alertait auprès de franceinfo Lucile Marbeau, porte-parole du Comité international de la Croix-Rouge (CICR) en France. Le 8 mars, au moins cinq personnes ont été tuées lors d’un largage de colis dont l’un des parachutes était visiblement défaillant. Une vidéo authentifiée par le New York Times montrait également d’autres colis sans parachutes. D’autres images montrent des provisions échouant en mer. “Le largage doit être un dernier recours”, pointe auprès de franceinfo Jonathan Fowler, porte-parole de l’UNWRA, l’agence des Nations unies pour les réfugiés palestiniens. “Il est utile dans des zones inaccessibles. Mais à Gaza, cela pourrait être différent, car des voies terrestres existent”, rappelle l’humanitaire à franceinfo.
Il engendre des situations de “chaos”
Autre conséquence : les violences que ces largages engendrent, dans un contexte de tension extrême. “Tous les jours, des personnes sont blessées, voire tuées. Tout le monde se bat pour obtenir des produits de base comme de la farine, des conserves, de l’eau, des lentilles, des haricots, des pois chiches et du halva”, a décrit à l’AFP Ahmed al-Rifi, un habitant de la ville de Gaza. “Tout le monde a faim, c’est le chaos pour obtenir de la nourriture. Parfois, il y a des fusillades, des blessures et des meurtres”, témoigne le Gazaoui.
Ouday Nasser, un autre habitant joint par l’AFP, décrit des scènes de désordre : “Lorsque nous atteignons la zone de largage, une grande foule se rassemble, cela entraîne des bagarres, le chaos. Certains tombent au sol dans la bousculade, les plus forts l’emportent sur les plus faibles. Parfois, certains utilisent un couteau, ou même tirent”.
“Ce qui devrait être un effort humanitaire s’est transformé en bagarres et en coups.”
Ouday Nasser, habitant de la bande de Gaza
à l’AFP
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